
Les vagues de chaleur l’emporteront sur la tolérance humaine
Une récente étude de chercheurs britanniques et américains a démontré que si la température mondiale monte de 2 °C, par rapport à la moyenne préindustrielle, la surface de la Terre présentement inhabitable augmentera de 35 %. Selon cette étude, 21 % de la surface du globe est déjà inhabitable pour certains car leur corps est incapable de se thermorégularisé lors de fortes vagues de chaleur.
Les vagues de chaleur sont l’événement météorologique le plus meurtrier dans le monde. Depuis l’an 2000, plus de 260 000 personnes ont perdu la vie à cause des vagues de chaleur qui ont frappé plusieurs régions du globe. La grande majorité de ces décès étaient des gens âgés, des bébés et des personnes à la santé déjà fragile. Cependant, dans la mesure où les vagues de chaleur seront à l’avenir plus intenses et plus fréquentes, elles exposeront plus de gens aux complications liées aux coups de chaleur. L’étude affirme que nous observerons une hausse du taux de mortalité à cause de la chaleur au cours des prochaines décennies.
C’est la combinaison de la chaleur et de l'humidité qui est responsable de la réduction de notre capacité d’adaptation. Pour arriver à déterminer le seuil de tolérance maximum de l’homme face aux vagues de chaleur, les chercheurs ont utilisé les valeurs obtenues à l’aide d’un thermomètre mouillé. Cet outil, dont on entend peu parler, offre une mesure de la température de l’air en tenant compte du taux d’humidité qu'elle contient. Celle-ci est suivie de la dénomination °C car c’est une température mesurée, contrairement à l’indice humidex qui est le résultat d’un calcul et qui ne peut donc pas être affiché avec le °C.
Reproduire le fonctionnement de votre corps
Lors de fortes chaleurs, votre corps transpire. C’est le processus naturel qui lui permet d’abaisser sa température interne. En s'asséchant, le liquide qui recouvre votre peau utilise votre chaleur pour s’évaporer. Ainsi votre corps a moins chaud. Cependant, lors d’une journée chaude et humide, ce processus est ralenti. En effet, puisque l’air contient déjà beaucoup de vapeur d’eau, il lui est difficile d’en absorber plus. La transpiration reste donc plus longtemps sur votre peau, ce qui empêche votre corps de poursuivre son mécanisme de refroidissement. Durant les périodes de chaleur, plus c’est humide, plus vous ressentez un inconfort car votre corps perd sa capacité naturelle à se rafraîchir.
Le fonctionnement du thermomètre mouillé reproduit ce mécanisme naturel. Il s’agit d’un thermomètre ordinaire auquel on attache un morceau de coton mouillé qui recouvre son bulbe. On le fait ensuite tourner rapidement à l’aide d’une poignée fixée perpendiculairement à l’autre extrémité. Au fur et à mesure que le coton s'assèche, la température du thermomètre baisse, car l’eau contenue dans le coton utilise la chaleur de l’air pour s’évaporer. Il est donc l’outil idéal pour déterminer la capacité thermorégulatrice du corps, car il tient compte de la température mais aussi du taux d’humidité dans l’air.
Quelques exemples
Les chercheurs ont établi qu’une température du thermomètre mouillé entre 26 °C et 31 °C représente le seuil maximum ou notre corps peut s’adapter. Ces valeurs sont différentes des évaluations précédentes. En effet, il avait été établi, par le passé, que 35 °C sur le thermomètre mouillé était le seuil maximum avant d’être exposé à un coup de chaleur. Voici quelques exemples où T représente la température de l’air, H représente le taux d’humidité et TM la température affichée sur le thermomètre mouillé.
T 48 °C + H 20 % = TM 28 °C. Journée typique à Phoenix, en Arizona l’été T 34 °C + H 60 % = TM 28 °C Journée chaude d’été à Montréal T 40 °C + H 50 % = TM 31 °C Journée d’été à Karachi, au Pakistan
Vous remarquez que même si les valeurs de température et d’humidité sont différentes, celles affichées par le thermomètre mouillé se trouvent toutes dans la zone où l’homme peine à se thermoréguler et se trouve ainsi à risque de souffrir d’un coup de chaleur. Les chercheurs ont fait appel à des volontaires afin d’établir cette nouvelle limite. Ceux-ci ont été exposés à différentes conditions durant 10 minutes. Ensuite, on a mesuré la température à l’intérieur de leurs œsophages pour établir le moment où le corps n’arrive plus à abaisser sa température interne. Le golfe Persique, le Bangladesh, le nord de l’Inde, une grande partie du Pakistan et de l’Afrique du Nord observent déjà de telles conditions.
Eh oui, encore les changements climatiques
Les modèles climatiques prévoient une hausse importante des périodes de canicule à cause de l’urbanisation, de la déforestation et de l'augmentation de la concentration de GES dans l’atmosphère. Bientôt, beaucoup d’autres régions se joindront à celles déjà très à risque. Les changements climatiques modifient la trajectoire du courant-jet. Celui-ci devient plus sinueux et varie beaucoup plus lentement. Ce faisant, les vagues de chaleur durent plus longtemps et sont plus intenses.
D’autres facteurs augmentent le risque de mortalité dû aux vagues de chaleur. La perte de récoltes et la hausse de la demande énergétique pour se rafraîchir mettent à risque les populations les plus pauvres. L’étude conclut aussi que l’adaptation pourrait permettre à l’homme de peupler les régions les plus à risque malgré l’augmentation de la fréquence et de l'intensité des vagues de chaleur à venir. Celles-ci sont généralement observées en milieu urbain. Plus de surfaces réfléchissantes et d’espaces verts aident à diminuer l’effet d’îlot de chaleur des villes. Nous pourrions aussi modifier les heures de ceux qui travaillent à l’extérieur afin de les faire coïncider avec les moments plus frais de la journée.